Publié le samedi 4 août 2018
La CNT était présente au 11ème congrès du Syndicat des Travailleurs Corses (STC) organisés les 9 et 10 juin 2018 à Bastia.
Créé en 1984, dans un contexte de création de structures de contre-pouvoir, par le mouvement indépendantiste corse, le STC est aujourd'hui la première force syndicale de l'île malgré les embûches posées tant par l'Etat français que par certaines organisations syndicales contestant sa légitimité et sa représentativité. Dernier exemple en date, la procédure intentée par la CGT en 2016 afin d'empêcher le STC de se présenter aux élections dans les TPE.
Les liens entre la CNT et le STC sont anciens : dès le deuxième congrès en 1988 une délégation de la CNT était présente. Depuis, cette solidarité réciproque ne s'est pas démentie comme au moment de la répression touchant les marins corses lors de la privatisation de la SNCM ou, dans l'autre sens, lors du combat mené par nos camarades de la section People&Baby.
Ces derniers temps, le STC a mené d'importantes luttes dans différents secteurs : en mai, une grève de 11 jours au Crédit Lyonnais, accompagnée de blocages des agences, a été menée pour revendiquer le maintien de la prime d'insularité, soit près de 2000 euros par an pour certain-es salarié-es. Ce mouvement avait été précédé par une autre mobilisation d'ampleur, en octobre 2017, dans les magasins Carrefour d'Aiacciu pour des raisons similaires. Lors de ce congrès, il a été affiché une détermination sans faille pour la défense du service public de santé en rappelant notamment les longues occupations de l'Agence Régionale de Santé en 2011 (40 jours) puis en 2017 (36 jours). Celles-ci avaient pour objectif d'exiger une revalorisation des moyens accordés aux hôpitaux corses alors que l'Etat refusait toute discussion, arguant notamment du fait que la Corse ne disposait pas de Centre Hospitalier Universitaire (CHU) alors même que la création d'un tel établissement est une revendication majeure de la société corse. Cela oblige de nombreuses et nombreux Corses à aller se faire soigner sur le continent et provoque une dégradation des équipements dans les hôpitaux corses. Il a également été rappelé l'engagement du STC pour la défense du patrimoine hospitalier insulaire, objet d'opérations de spéculation immobilière.
Autre exemple de la situation de dépendance créée par l'Etat français, les nombreux incendies qui touchent la Corse ne peuvent pas toujours être combattus par les pompiers de l'île, non par manque de Corses prêtes et prêts à s'engager pour défendre leur patrimoine naturel mais parce que les moyens matériels ne sont pas à la hauteur. Ainsi, lors des incendies ayant touché une région au Sud de Bastia en janvier 2018, les pompiers corses étaient condamnés à regarder passer leurs collègues venu-es du continent et équipé-es.
A l'heure où la Corse connaît d'importants changements politiques avec la création d'une Collectivité unique dirigée par les autonomistes et indépendantistes, le STC se donne pour objectif de défendre les intérêts des travailleuses et travailleurs de Corse y compris face au patronat corse qui cherche à tirer profit de la nouvelle situation pour continuer à s'enrichir aux dépends de la classe travailleuse. Un combat mené en toute indépendance, la quasi totalité du budget de l'organisation étant constitué des cotisations des adhérentes et adhérents, sans financement de l'Etat.
Malgré ces évolutions politiques, la situation économique et sociale ne s'est pas améliorée. Pour preuve, le taux de chômage reste l'un des plus hauts de l'Etat français malgré une croissance du PIB importante ces dernières années. Afin de lutter contre ce chômage touchant la population de l'île, le STC revendique la priorité à l'emploi local pour que « vivre et travailler au pays » ne soit pas qu'un slogan. La définition du peuple corse comme étant une « communauté de destin », indifféremment aux origines de chacun-e, a été réaffirmée. Parmi les nombreux exemples où les travailleuses et travailleurs corses sont discriminé-es, l'ouverture de grands centres commerciaux à la périphérie des villes ne provoque aucune diminution du nombre de chômeurs malgré des créations d'emploi. De plus, ces constructions de grandes surfaces dédiées à la surconsommation sont dénoncées par le STC en raison de leur impact environnemental, social, économique et culturel. Un engagement clair a été pris afin de bloquer tout projet de ce type.
Pour répondre à cette précarité, une association de solidarité aux privé-es d'emploi, adossée au syndicat, a été réactivée, pour faciliter la solidarité concrète (panier alimentaire par exemple) en s'appuyant sur les sections présentes dans les commerces ou dans d'autres secteurs d'activité (Pôle emploi, services sociaux, etc.). Cela doit également permettre de maintenir le lien entre le syndicat et les travailleuses et travailleurs privé-es d'emploi et de pouvoir porter une parole spécifique sur cette question. L'importance de la solidarité interprofessionnelle a également été rappelée, une solidarité qui « ne se décrète pas mais se construit », notamment à travers le renforcement des unions locales.
Enfin, le STC a réaffirmé son engagement internationaliste à travers la présence de plusieurs délégations, outre la CNT, étaient présents l'union syndicale Solidaires, l'USTKE (Kanaky), l'UGTM (Martinique), l'UGTG (Guadeloupe), le SAVT (Val d'Aoste), l'Intersindical-CSC (Catalogne), la CSS (Sardaigne) et LAB (Pays basque). Ces dernières organisations étant membres de la Plate-forme des Syndicats des Nations Sans État qui cherche à regrouper les syndicats combattant pour l'émancipation nationale et sociale de leur peuple. Un communiqué commun a été produit contre la répression exercée par l’État espagnol en Catalogne.
Des échanges chaleureux qui nous engagent à développer et renforcer nos liens avec les travailleuses et travailleurs de Corse.
GT Europe
Article publié dans Le Combat Syndicaliste n°437 (Été 2018)
Rien pour ce mois