Publié le samedi 20 octobre 2018
L’USTKE, syndicat indépendantiste kanak, appelle à la non-participation massive au référendum du 4 novembre, la CNT était présente à son XVIe Congrès.
« La décision était attendue par tout le pays », a souligné le président du l’Union syndicale des travailleurs kanaks et exploités (USTKE), André Forest, réélu à la tête de la confédération syndicale. Tenu les 7-8-9 septembre à Nouméa, au centre Culturel Ko We Kara, le XVIe Congrès de la première confédération syndicale indépendantiste de Nouvelle Calédonie a décidé d’appeler à la non-participation au référendum d’autodétermination sur l’indépendance, qui aura lieu le 4 novembre prochain (1). Environ 400 personnes dont 250 délégués ont largement évoqué cette question, au centre des jours de débat et ont tranché nettement en faveur de la motion de non-participation. Une position également prise en juillet dernier par le Parti travailliste (PT), l’émanation politique créée par l’USTKE en 2007.
La décision était attendue, mais peu surprenante. Deuxième syndicat le plus représentatif derrière l’USOENC, l’USTKE est en effet historiquement liée à l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, de la Kanaky, comme la nomment les indépendantistes, depuis sa fondation le 5 décembre 1981, à la cantine des dockers du Port autonome de Nouméa. L’USTKE avait déjà pris position en 1998 contre les accords de Nouméa, qui revenaient sur ceux de Matignon-Oudinot, (1988). Ces derniers prévoyaient la tenue du référendum de 2018 sur la base du corps électoral gelé en 1988. A cette époque, les Kanaks étaient majoritaires, en termes démographiques. Ce n’est plus le cas aujourd’hui (40% des 267 000 habitants).
Signés par le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), le 5 mai 1998, les accords de Nouméa ont transféré de nombreuses compétences vers les institutions de Nouvelle Calédonie, à l'exception des compétences dites régaliennes, celles de la défense, de la sécurité, des affaires étrangères, de la justice et de la monnaie.
Louis Kotra Uregei, président du collège honoraire de l'USTKE mais aussi du Parti travailliste, a expliqué la position du syndicat : les conditions d’un scrutin sincère n’étaient pas réunies, notamment en raison de « la fraude électorale », et de la non-inscription de milliers de kanaks sur les listes électorales pour le référendum.
En outre, les congressistes n’ont cessé de rappeler notamment dans les rapports établis par les fédérations (2), les résultats largement insuffisants des accords de Nouméa, en matière d’emploi local et de rééquilibrage. Les Kanaks demeurent plus sévèrement touchés par le chômage que les autres populations, et peinent toujours à accéder à des postes de cadres ou à responsabilité. Sans compter une grande misère sociale, malheureusement traduite par une statistique : 93% des détenus en Nouvelle Calédonie sont des Kanaks.
Si l’USTKE a donc refusé de participer au processus, contrairement à d’autres organisations indépendantistes, comme l’Union Calédonienne (UC), le Parti de libération kanak (Palika), qui appellent à voter Oui, les dernières estimations ne sont guère optimistes pour le camp des indépendantistes : deux sondages publiés début septembre annoncent une nette défaite du Oui, dans l'archipel (3).
Les débats ont été suivis par les délégués internationaux intervenus lors de la soirée consacrée à la solidarité internationale, le 8 septembre : la CNT, le Syndicat des travailleurs corses (STC), la CGT, Solidaires, et la confédération polynésienne O Oe to Oe Rima se sont ainsi exprimés devant les adhérents de l’USTKE.
Le Groupe Océanie
(1) Le 4 novembre, les citoyens néo-calédoniens et les résidents du territoire seront appelés à se prononcer par oui ou par non à la question : "Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ?"
(2) L’USTKE revendique environ 4 800 membres, répartis dans 11 fédérations : BTP, Mine Carrières et métallurgie, Commerce et services, Energie, Industrie, Ports et Docks, Enseignement, Fonction publique, Banques, Transport-hôtellerie et restauration, presse et audiovisuel (FPIPA).
(3) En cas de défaite du oui, deux autres référendums sont possibles, en 2020 et 2022.
Article publié dans Le Combat Syndicaliste n°438 (Octobre 2018)