Publié le samedi 15 octobre 2016
Au niveau quantitatif, sur les 26 millions de Marocains qui ont le droit de vote, il n’y en a que 16 millions qui ont été enregistrés sur les listes électorales, d’une manière ou d’une autre. Le nombre d’inscrits sur les listes électorales ne dépasse pas les 14 millions alors que 75% des Marocains ont boycotté les élections législatives du 7 octobre 2016. De plus, six millions de Marocains résidants à l'étranger ne sont pas invités à s'exprimer dans ce scrutin.
Les mouvements sociaux marocains ont mené une campagne début octobre dans plusieurs villes marocaines appelant au boycott des élections législatives du 7 octobre 2016. Ma msawtinch [Nous ne voterons pas] est un hashtag qui a largement été relayé dans les rues et les réseaux sociaux en proposant un argumentaire favorable au boycott, contre la corruption, la répression, la torture et les arrestations politiques. Et en dénonçant de façon générale la domination totale de la monarchie qui a toujours tous les pouvoirs.
Dans la Constitution adoptée en 2011 (Constitution proposée par le roi dans l’objectif d’étouffer la mobilisation massive du mouvement du 20 février qui a touché l’ensemble du Maroc), le chef du gouvernement, quel que soit son poids politique, aide seulement à la création des ministères, qui ne sont que des “comités”, pour appliquer, gérer et mettre en œuvre les projets royaux. Le ministère de l'intérieur, avec son passé noir dans la corruption et les pratiques de tortures, est toujours le responsable principal de l'organisation des élections.
En fait, le roi, chef d'État à vie, domine le champ économique avec des grands projets, contrôle les affaires étrangères, le ministère de l'intérieur et se positionne comme président des institutions sensibles et stratégiques du pays (armée royale, pouvoir judiciaire...). Et il se considère aussi comme le commandeur des croyants (le pouvoir religieux). Dans ce cadre dictatorial, toutes les libertés sont réprimées, les inégalités augmentent et le taux de chômage explose. Le Roi, conformément à l'article 48 de la Constitution, préside le Conseil ministériel, dont le premier ministre est un simple membre. Ce conseil ministériel est le grand laboratoire qui ne fait que gérer l’application des plans stratégiques du monarque en étudiant, en orientant et en imposant ceux-ci. Et depuis 1956, il est la cause de la misère que vit le peuple marocain. Les élections législatives du 7 octobre ne représentent, pour les mouvements sociaux, qu’une pièce théâtrale fictive conduites par les partis au gouvernement. Sachant aussi que “Sa Majesté” peut dans tous les cas, conformément à l’article 51 de la Constitution, dissoudre les deux chambres “élues” du Parlement. A la base, les partis élus se contentent de n’être que la majorité de “Sa Majesté”, et même l’opposition appartient à “Sa Majesté”. Rien de nouveau.
Les mouvements sociaux marocains ont subi un harcèlement incroyable durant la campagne de boycott. Des membres du parti marxiste La Voie Démocratique (seul parti politique appelant au boycott) ont été gravement blessés et transportés à l'hôpital de Rabat le 5 octobre, à cause de la répression féroce durant une diffusion de tracts. De même pour des militants du mouvement du 20 février à Casablanca. La police a également arrêté un habitant qui a cassé une urne dans un bureau de vote le 7 octobre, et n’était toujours pas libéré le 14 octobre selon des sources proches. Dans un village pauvre et marginalisé du Sud Ouest du Maroc, les bureaux de vote ont compté zéro vote !
H. Hannaoui, membre de la Voie Démocratique, blessé au crâne, lors d'une diffusion de tract appelant au boycott des élections législatives, le 30 septembre 2016, à Salé, banlieue de Rabat.
Sans surprise, les mêmes partis à la botte du pouvoir sont arrivés en tête de cette mascarade électorale, en premier lieu le parti du PJD (Parti Justice Développement, islamiste et libéral) qui a mené une politique contre le peuple ces cinq dernières années, avec une série de réformes antisociales, comme celle sur le système de retraite, tout récemment, ou encore celle sur l’augmentation des prix des produits de base.
Dans ce contexte politique, les Marocains ne s'inquiètent pas pour le déroulement de ces élections législatives, mais surtout pour le fait qu’elles ne représentent pas la volonté réelle du peuple. Celle qui est basée sur la défense de la liberté, la dignité et la justice sociale.
S.I., militant du Mouvement du 20 Février, Maroc.
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