Secrétariat international de la CNT

L’Axe du Mâle

Publié le samedi 7 novembre 2020

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Le 22 octobre, 32 pays signaient la Déclaration du Consensus de Genève, déclarant conjointement "qu’il n’existe aucun droit international à l’avortement”. Plus fondamentalement est mis en avant la nécessité de réaffirmer la famille comme “fondement de la société" avec de nombreux arguments présentés comme féministes comme par exemple le risque que ferait prendre l'IVG médicamenteux à la santé des femmes, santé que ces pays entendent protéger... Très concrètement les Etats signataires énoncent qu’il n’existe pas d’obligation de la part des Etats de financer ou de faciliter l’avortement.

Cette Déclaration commune, menée à l’instigation du Secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, se donne à lire comme une défense "des droits de l’Homme" et de “l’égalité des chances” pour tous les individus à naître. Elle s’inscrit en réaction aux lois de bioéthique qui autorisent dans plusieurs pays une série de mesures progressistes comme la PMA, ou favorisant l’inclusion des communautés LGBT et leur accès à la procréation. Nous ne pouvons que dénoncer la politique patriarcale de ces Etats signataires.

L'offensive réactionnaire de plusieurs pays apparemment fort éloignés politiquement, sauf lorsqu’il s’agit du patriarcat montre encore une fois que le droit de disposer de son corps est la garantie pour les femmes de ne plus être soumises aux désidérata ou aux violences de leur mari, de leur famille ou du pouvoir religieux. A cet égard, parmi les signataires nous voyons s'associer les fondamentalistes religieux de tous bords.

Le droit à l'Interruption Volontaire de Grossesse est un droit conquis de haute lutte, sans cesse remis en question. Il est considéré comme illégal et pénalisé dans de nombreux pays ou n’est autorisé qu'en cas de danger imminent pour la survie de la mère. L'accès à l'Interruption Volontaire de Grossesse est un droit qu'il nous faut sans cesse défendre. Chaque année, en France, 5000 femmes partent à l’étranger pour avorter parce qu’elles ont dépassé les délais légaux (12 semaines) pour avorter. Des centres d'IVG ferment ainsi que des Planning Familiaux et des Centres de prévention, pourtant essentiels quand à l'accès à l'éducation à la santé et à la sexualité, à l'accès aux contraceptifs et aux soins. Ces lieux anonymes et gratuits sont de plus en plus rares et n'ont plus les moyens d'exister. La casse de l'Hôpital public a un impact direct sur l'accès à l'IVG. Notons aussi que sur le territoire français, son accès n'est pas le même pour toutes, selon les départements, ou selon la situation administrative (notamment pour les femmes migrantes).

En Pologne, cette Déclaration dite “en faveur des femmes” a été immédiatement suivie d’effets : La semaine même de sa signature, le Tribunal Constitutionnel a approuvé une interdiction quasi totale de l’avortement : Il a déclaré l’avortement pour raison de malformation du fœtus, « grave et irréversible », au même titre que l’avortement suite à un viol, délégalisant de fait l’Interruption Volontaire de Grossesse dans le pays.
Dès le 26 octobre, la réaction a été extrêmement forte. Les femmes ont décidé d’entamer une grève générale qui a bloqué le pays, après avoir fait irruption au Parlement pour dénoncer la violence du parti conservateur PiS au pouvoir. Ce parti dont les ordres viennent directement du Vatican, multiplie les restrictions, opprime les femmes, qui sont encore des milliers à mourir chaque année des suites d’un avortement réalisé dans de mauvaises conditions. Les grèves et manifestations qui se sont succédées pendant près d’une semaine dans l’ensemble du pays ont réussi à l’emporter : Jeudi 5 novembre, la décision du Tribunal constitutionnel était suspendue.

La grève générale féministe avait été lancée en mars 2017 en Argentine, où l’avortement est toujours interdit, avec comme slogans “Ni una menos” pour rappeler les disparitions de femmes dans tout le continent, “Cuando paramos, el mundo para”, rappelant que le travail féminin, salarié ou non, invisibilisé car souvent informel, est la condition nécessaire à l’activité économique, sociale et politique de l’ensemble du pays.

Ces grèves féminines, rendent visibles les violences et discriminations que subissent les opprimé-es de genre, et témoignent de la force du collectif. Elles semblent être la meilleure réponse internationaliste à l’Axe du Mâle, patriarcal, clérical, réactionnaire qui fait du corps des femmes une marchandise et un terrain de guerre. La victoire des polonaises est remarquable à cet égard : Une semaine de mobilisation et de grève féminine massive a montré la puissance d’un refus collectif de rester invisibles et soumises à l’ordre patriarcal.

Le Secrétariat International

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