Publié le mardi 4 juin 2024
Dans la situation actuelle en Kanaky, le gouvernement libéral de l’État français n’est pas juste le garant de l’ordre républicain, il est a aussi quelques responsabilités. D’abord en cherchant à imposer comme seule valide le projet d’une Nouvelle-Calédonie française, business friendly, où pourrait prospérer le capital économique accumulé depuis plus d’un siècle. Un capital de colons exploiteurs des ressources du Caillou et des travailleur·ses qui y vivent, le plus souvent kanaks.
Bien-sûr, les libéraux incultes du gouvernement actuel applaudissent et soutiennent quand on leur parle de profits juteux sereinement tirés de la sueur de prolos. Et puis, si on peut se vanter sur la scène internationale de disposer d’un territoire dans le Pacifique et de ressources en nickel qui font saliver les grandes multinationales de l’extraction, alors c’est du plaisir sans gène pour le gouvernement français.
Qu’importe si l’ordre sur ce territoire reste surtout colonial. Qu’importe si les perspectives pour des milliers de jeunes kanaks sont d’osciller entre trime et chômage pour payer des produits de bases 73 % plus cher qu’en Hexagone, de s’engager dans l’armée et la police du colon où règne le racisme, ou d’être arrêté à la première incartade légale pour être emprisonné, comme au Camp Est, avec son taux d’occupation variant entre 150 et 200 %. Qu’importe si, pour arriver à ses fins, le gouvernement s’assoit sur 30 ans de politique d’apaisement et de longues et nécessaires discussions et proclame que maintenant, la démocratie, c’est lui qui la fait. En suspendant des moyens de communication, en déployant ses troupes, en emprisonnant et faisant juger à la chaîne.
Aujourd’hui, le sang coule. Décomplexées et calibrées, les milices caldoches laissent éclater leur racisme en tuant des jeunes kanaks. La couleur de peau suffit à distinguer qui vit, qui meurt. Ici, en Hexagone, à des milliers de kilomètres, des caldoches chialent en parlant de « racisme anti- blanc ». Mais ces maisons et ces magasins qui brûlent sont réparables, parfois même assurés. Comment on répare un mort ? Et qui, en première instance, avait promis « le bordel » si le texte du dégel de ne passait pas, si ce n’est Sonia Backès, membre du parti Renaissance et présidente de l’assemblée de la Province Sud, où se concentre le capital colonial ? Pour pouvoir exister, être connu et reconnu des autres, quel est le prix ? Dans les années 80, près de 90 personnes sont mortes pour que l’État français et ses colons comprennent que les Kanaks ne sont pas rien en Kanaky.
Ce n’est qu’au prix de révoltes coûteuses en vies humaines que les organisations kanaks sont parvenus à arracher à cette caste d’héritiers et à l’État qui les protège le droit d’être reconnues légitimes sur la terre de leurs ancêtres. Combien de morts et de destructions faudra-t-il cette fois pour que les Kanaks ne soient pas renvoyé·es aux marges, contrôlables et contrôlées, de la « minorité ethnique » ?
Le projet de loi visant à dégeler le corps électoral en Kanaky, comme les milices, comme le colonialisme, procède d’une logique barbare d’accaparement violent des terres. « Notre île » disent les colons. Certain·es la croyait d’un autre temps cette logique, et pourtant elle est toujours là. La stratégie qui suit cette logique est d’invisibiliser, pour mieux faire disparaître. La révolte en est la conséquence. Et l’appareil répressif qui se met en place, nous le connaissons déjà.
Alors il faudrait redire que la présence coloniale française est critiquable ? Que les ressources et les profits sont toujours accaparés par une minorité pour qui la Kanaky n’est qu’une résidence parmi d’autres ? Il faudrait réexpliquer que le colonialisme est un crime, qu’il est condamné par le droit international ? Que la Kanaky est considérée par l’ONU comme un « territoire non autonome », dont la puissance administrante est responsable d’assurer la décolonisation ?Doit on encore expliquer pourquoi nos camarades de l’USTKE se battent sur le front du travail, dans les transports, dans les mines, jusqu’aux plus petites entreprises, pour faire respecter un codedu travail miné par les oppressions diverses des patrons locaux ?
Comme le disait l’indépendantiste kanak Jean-Marie Tjibaou « Nous sommes fatigués d’expliquernotre histoire ». Nombre de jeunes sont fatigué·es, d’ancien·nes aussi.
La CNT soutient les indépendantistes kanaks réunis dans la CCAT, qui exigent le désarmement des milices caldoches, le départ des nouvelles troupes françaises déployées en Kanaky, la libération desprisonnier·es politiques de ces dernières semaines, et la réouverture des discussions en vue de la reprogrammation d’un véritable référendum, organisé dans les conditions exigées en 2021.
Dans tout le Pacifique, les terres colonisées sont nombreuses. De la Papouasie occidentale aux îles Polynésiennes, la CNT déclare son soutien à tous les mouvements de décolonisation : pas de liberté possible sans émancipation, pas de démocratie possible sous tutelle.
Vive la lutte des classes, vive l’indépendance des peuples, à bas l’empire français !
Rien pour ce mois