Secrétariat international de la CNT

Irlande : Ná géill slí, Shell to sea !!!

Publié le lundi 10 novembre 2008

Depuis que les cours des ressources énergétiques fossiles ne cessent de flamber, la recherche de nouveaux gisements est devenue la priorité des multinationales qui contrôlent ce secteur économique. Et cela à n'importe quel prix.

C'est ce qui se passe actuellement à l'ouest de l'Irlande, dans le comté de Mayo, avec le gisement gazier de Corrib. Ce gisement important a été attribué en 2002 à Shell et l'entreprise norvégienne Statoil. Le consortium pensait alors pouvoir faire tranquillement ces travaux, à savoir la construction d'un pipeline et d'une raffinerie dans la baie de Broadhaven, pour commencer l'exploitation du gisement en 2005.

Mais c'était sans compter sur la mobilisation des habitants locaux, qui ont refusé de voir leur cadre de vie saccagé et qui se sont opposés au passage des travaux de construction du pipeline sur leurs terres. Cette mobilisation a débouché sur la création d'une structure de lutte unitaire à l'échelle de toute l'Irlande, Shell to sea, qui réunit de nombreuses organisations syndicales et politiques, dont les militants libertaires et anarcho-syndicalistes de Workers Solidarity Movement et d'Organise. Shell to sea mène une résistance active et non-violente au projet de Shell, en appuyant ses critiques sur 3 points :

- Tout d'abord, le projet de Shell est un désastre écologique, car il consiste à construire d'énormes infrastructures industrielles en plein milieu d'une zone naturelle classée, qui est aussi une zone marécageuse instable, ce qui fait courir un risque réel d'accident industriel dans le futur.

- Ensuite, la construction du pipeline va totalement bouleverser la vie des communautés locales d'Erris et de Rossport, qui sont de petites communautés d'agriculteurs et de pêcheurs, dont une partie des terres doivent être confisquées.

- Enfin, la "république d'Irlande" , fidèle à sa ligne ultra-libérale qui consiste à attirer des investisseurs étrangers grâce à une fiscalité avantageuse, a diminué son taux d'impôts sur les sociétés pétrolières et gazières de 50 à 25% et supprimé les royalties, tout en leur accordant en plus la possibilité de déduire 100% de leurs coûts du montant de leurs impôts. Tout est fait pour permettre aux multinationales de faire encore plus de profits, tandis que les citoyens irlandais ne profiteront pas de l'exploitation de leurs ressources naturelles.

Face à cela, Shell to sea propose d'abord l'abandon des travaux dans la baie de Broadhaven, au profit d'une exploitation du gaz en mer, comme cela se fait ailleurs en Irlande. Ensuite, Shell to sea réclame que les ressources énergétiques irlandaises soient gérées par le peuple irlandais et au service du peuple irlandais. Même si tous les membres de Shell to sea et les organisations qui soutiennent cette lutte ne sont pas forcément d'accord sur ce que doit signifier cette revendication, beaucoup défendent la collectivisation ou la nationalisation de l'exploitation du gaz irlandais, rompant ainsi clairement avec la logique capitaliste sur ce point.

Pour obtenir la satisfaction de ces revendications, Shell to sea mène depuis 4 ans une intense lutte, aussi bien localement que nationalement, que ce soit en organisant un campement permanent sur place, en multipliant les manifestations et les débats, en bloquant le chantier de construction ou en organisant des piquets devant les stations service de Shell, pour toucher celle-ci au niveau des finances.

Mais cette lutte a pris au début du mois de septembre un tour plus dramatique. En effet, Shell, avec l'appui du gouvernement des 26 comtés qui réunit le parti de centre-droit Fianna Fail et les Verts , a lancé la pose effective du pipeline. Cela a entraîné une accélération de la mobilisation de Shell to sea, qui multiplie les actions, et même une grève de la faim de la part d'une enseignante de la communauté d'Erris. La lutte est donc à un tournant. Soit elle parvient à bloquer les travaux et peut espérer gagner sur la localisation de l'exploitation du gaz, soit il sera beaucoup plus dur de vaincre Shell.

C'est donc maintenant que notre solidarité et notre soutien sont importants. Car, ne nous y trompons pas, cette lutte est aussi la notre. Elle pose la question du refus du saccage de la planète par le capitalisme, elle pose la question de la propriété et de la gestion des ressources naturelles, elle pose la question du droit des communautés locales a décidé démocratiquement de leur avenir. Et cela alors que le peuple irlandais des 26 comtés vient de rejeter par référendum au mois de juin le traité européen libéral de Lisbonne. Vote dans lequel ce qui se passe dans le comté de Mayo a bien sûr eu un fort impact. Shell to sea a d'ailleurs très bien compris cette enjeu international, puisqu'elle a créé des liens avec les victimes de Shell au Nigéria ou ailleurs.

C'est pourquoi nous devons construire un soutien à cette lutte. Car si la devise de la milice ouvrière de l'Irish Citizen Army , "la terre, la mer et l'air d'Irlande au peuple d'Irlande", est plus que jamais d'actualité, le problème se pose aussi à l'échelle mondiale. Puisque l'exploitation capitaliste est internationale, il faut que la résistance le soit aussi.


Liam Behan.
Solidarité Irlande Paris.

solidarite.irlande live.fr


1°- Pas de reddition, Shell à la mer.

2°- En réalité l'état libre des 26 comtés, car les 6 comtés irlandais du nord-est sont encore occupés par l'impérialisme britannique.

3°- Comme quoi, les verts irlandais sont tout autant capables que les verts français d'oublier leurs promesses écologiques lorsqu'ils arrivent au pouvoir.

4°- On se souvient de la pendaison par l'état nigérian en 1995 de 9 activistes, dont l'écrivain Ken Saro-Wiwa, qui s'opposaient au pillage par Shell du delta du Niger.

5°- L'ICA fut fondé en octobre 1913 lors de la grève générale de Dublin par les syndicalistes révolutionnaires Jim Larkin et James Connolly pour protéger les grévistes. Elle prendra ensuite part à l'insurrection indépendantiste de Pâques 1916.

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