Publié le vendredi 10 avril 2009
Réalisée le 27/02/09 à Lujàn province de Buenos-Aires, lors de la rencontre des groupes libertaires latino-américains (Elaopa VII), dans le cadre de la commission syndicale, cette interview a été faite dans le but d'aider les camarades de la SIMeCa (Syndicat Indépendant des Messagers et Coursiers). Cette structure militante lutte pour la reconnaissance de leur syndicat et pour la levée des peines que certains d'entre eux sont susceptibles d'encourir.
Peux-tu faire une brève présentation du SIMeCa et de la situation actuelle ?
Mon nom est Luciano , secrétaire syndical du syndicat SIMeCa à
Buenos-Aires. Notre syndicat est indépendant. Il regroupe les coursiers et messagers (en moto en général). 95% des adhérents sont sur Buenos-Aires capitale. Les membres du syndicat travaillent en grande partie pour la chaîne d'empanadas Noble Repulgue.
La difficulté de se syndiquer réside dans la
fragmentation des travailleurs dans une multitude de franchises locales. Une multitude de petites boutiques où le patron n'est qu'une entité abstraite qui apporte la nom du magasin, sans plus. Le responsable de la franchise s'occupe seul de l'emploi, c'est un sous-patron de la marque.
La situation actuelle est la même depuis 10 ans, nous luttons pour avoir la personnalité juridique de syndicat.
Pour mieux comprendre comment vous vous organisez, peut-tu revenir sur les évènements de l'année dernière ?
L'année dernière, nous étions 160 camarades à travailler au noir, ce qui signifie travailler sans aucune sécurité de l'emploi. Les licenciements abusifs sont monnaie courante, sans couverture santé (sur Buenos-Aires, le
travail de coursier en moto est dangereux, des accidents arrivent tous les jours, sans parler des conditions de travail des camarades qui sont à la confection, pas d'aération, des locaux minuscules étouffants etc.)...
Nous avons alors lancé une campagne pour la régularisation de tous.
Comment êtes-vous passés des assemblées “informatives” à l'action directe ?
Vu la situation, nous n'avions évidemment pas d'heure d'information syndicale. Nous avons dû commencer par nous réunir comme on pouvait, en allant voir des camarades dans leur locaux. Nous avons commencé une lutte pour les
régularisations, après négociations, 30 sortirent blanchis sur 160.
Depuis, tous les vendredis à l'heure de pointe des livraisons et confections, on
occupe les locaux de confection d'empanadas avec sabotage et diffusion d'informations. Comme il s'agit de franchises, il a fallu faire cela patron par patron, local par local. Le plan de lutte était très clair : régularisation de tous les camarades. Ce but a été suivi dans l'action pendant un an.
Aujourd'hui tu es passé (en moto d'ailleurs) à la Elaopa pour informer la commission syndicale de l'état d'urgence actuelle de ton syndicat et de certains camarades en particulier qui ont été inculpés suite à cette année de lutte, peux-tu nous en dire plus ?
Aujourd'hui la marque, Noble Repulgue, a lancé un procés contre le syndicat SIMeCa. Mais les chefs d'inculpation ne reposent que sur une tête en fait, la mienne. C'était le plus facile à faire pour eux vu que les camarades m'avaient nommé porte-parole du syndicat. Pour eux cela revient à être le leader des actions et sabotages qui ont été menés. Chaque patron de chaque local de la marque se porte témoin pour le procès, en faveur de Noble Repulgue, évidemment. Mes chefs d'inculpation sont “actions groupées avec aggravations et détériorations”. Je risque actuellement 2 à 4 ans de prison. Il reste aujourd'hui 6 mois avant la fin de l'appel.
Comment ont réagi les autres organisations syndicales face à votre lutte et sa répression ? Et quelles sont vos relations en général avec les autres syndicats argentins ?
Plus organisé, le secteur devenait de plus en plus intéressant pour la CGT par exemple, vu que ce secteur n'a jamais été syndiqué, de par sa forme éclatée de localisation et de travail ! Ce secteur représente 50000 personnes aujourd'hui
L'autre grande centrale syndicale existant et regroupant plusieurs groupes de petits syndicats qui n'ont pas de reconnaissance juridique, est la CTA (Central de Trabajadores Argentinos, Centrale de Travailleurs Argentins).
Depuis peu nous travaillons avec eux. Il s'agit d'une alliance très partielle, le SIMeCa reste politiquement indépendant face au CTA qui est en grande majorité bureaucratique.
Notre syndicat est une construction de « base », partie de
rien, où la lutte s'est construite par et pour les camarades, à partir d'assemblées d'information syndicale jusqu'à l'action directe.
Propos recueillis par Judith, Groupe Americas du SI de la CNT
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